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L' EMMERDEUR
— Ce soir, les amis, vu l’importance de l’information que je porte à votre connaissance, vous n’avez pas à aller voir sur mes autres pages si une nouvelle différente y est déposée. Que vous soyez sur « FaceBook », « la Vie en Guyane », sur « amazonesolitude » ou sur « joreg », vous y découvrirez le même texte. Et pour cause…
— Contrairement à ce que l’on imagine, une journée ne se termine pas nécessairement sur une mauvaise note, si j’en juge par la dernière information qui vient de nous parvenir. Les autorités nous annoncent l’arrestation d’un dangereux individu. Il y avait si longtemps qu’il « semait la terreur dans la région » que les habitants se désespéraient de ne pouvoir vivre comme tout bon citoyen lambda. Imaginez plutôt :
— Il passait ses journées à terroriser ses compatriotes à ce point qu’on le pensait être diplômé de la plus haute école de la malfaisance. Certains, qui l’avaient connu des années au paravent, prétendaient même que pour nuire sans perte de temps inutile, il avait plusieurs cordes à son arc, assuré qu’il était ainsi de toucher ses victimes à coup sûr tirant dans toutes les directions.
C’était un solitaire ; jamais il n’était fatigué de réaliser un nouvel exploit. Il avait été renvoyé de l’école de musique alors qu’il était encore très jeune. Le professeur l’accusait d’écorcher volontairement les notes pour voler l’âme de son violon.
On pensait que le mal était son plus proche parent. Dans les prés, avec un certain plaisir, il effeuillait les marguerites et son forfait accompli, les abandonnait à l’ardeur d’un soleil meurtrier, avant de se précipiter vers les criques et les rivières où il cherchait à noyer le poisson.
On évitait de croiser son chemin, car le bruit courait qu’il fusillait du regard et jeter des pics à tort et à travers.
Un jour, mon voisin me confia que l’un de ses jeux favoris lorsqu’il vivait sur la ferme était de casser les quatre pattes des canards pour l’unique plaisir de les rendre boiteux.
On le savait incohérent. Ne bourrait-il pas la tête des gens pour mieux laver leur cerveau ? On le surprit même à brûler la chandelle par les deux bouts. Uniquement pour se distraire et voir les larmes de la chandelle se solidifier en touchant la surface de la table, avait-il confirmé aux enquêteurs.
Les mauvaises langues disaient à voix basse que l’intolérance était devenue sa maîtresse.
Jamais, on ne se serait pas risqué à l’inviter dans aucune fête. Il y passait son temps à frapper le champagne.
Il lui était impossible de nouer un contact sans essayer de l’étrangler.
Le bruit avait circulé, qu’il avait bien été marié, mais que la malheureuse épouse avait fini par s’enfuir du domicile conjugal. Chez lui, inlassablement, il battait le beurre et fouettait la crème qu’il finissait par brûler avant de la renverser. Son leitmotiv, c’était en toute occasion de retourner une situation.
Il avait l’art pour étouffer une rumeur qui venait tout juste de naître. Dans les villages voisins, il fit de nombreuses victimes. On l’accusait de boire les paroles des gens et de se suspendre à leurs lèvres pour leur couper le souffle. Sa plus belle trouvaille, disait-il, fut le cadeau qu’il offrait à ceux qui l’ennuyaient : une paire de ciseaux pour leur couper les envies, y compris l’appétit !
À d’autres, ils coupaient les cheveux en quatre et il mutilait les plus beaux visages en effaçant les sourires.
Aucune jeune fille ne se risquait à l’approcher, car il n’avait pas son pareil pour leur arracher des larmes après leur avoir fendu le cœur.
Interrogée, sa mère avoua qu’enfant, déjà il avait coupé la corde à virer le vent, en même temps que celle à couper le beurre et qu’elle ne pouvait jamais assister à un opéra, car il y passait son temps à casser les noisettes aux autres spectateurs.
De l’école, il se fit renvoyer à cause de la multiplication de ses méfaits, de la soustraction systématique des pages d’histoire, qu’il prétendait vouloir refaire. Il était parvenu à diviser la classe en plusieurs sections et il additionnait les mauvaises notes comme d’autres collectionnaient les bons points.
La cantine lui avait refusé sa porte. Il prenait un malin plaisir à voler la truite de son ami Schubert.
Parmi les faits les plus graves qui lui sont reprochés, il y avait les multiples viols de règlements et plus odieux encore, durant des années, il avait broyé du noir, se mettant à dos la communauté des gens de couleurs.
Sa vie était ainsi faite qu’il se croyait au-dessus des lois et invincible, prétendait-il. Une seule fois, il tenta de se justifier, mais ce fut plus fort que lui. Il aveugla l’opinion, puis tenta de la noyer sous un flot de paroles. Voyant que la réunion tournait en sa défaveur, sous les yeux des plus faibles il cloua le bec des meneurs.
On ne lui connut qu’un seul ami. Il se nommait Pierrot. C’est grâce à lui que l’on doit d’avoir encore la lune en bonne place dans notre ciel, car l’indélicat personnage s’était mis en tête de la décrocher pour l’offrir à l’élue du moment, avant que son ami l’en dissuade.
Voilà mes amis, la bien triste histoire qui se faufile entre les jours d’une année qui peut enfin respirer. Dans les chaumières, les braves gens pourront désormais dormir tranquilles, plus personne n’essayant de blesser leur amour propre. Les artistes pourront sans crainte pousser la chansonnette sans risquer de voir les paroles massacrées et au village, on enterrera plus de vies de garçon sans raison.
Notre petit monde est soulagé, l’emmerdeur ne nuira plus à personne, sauf au temps peut-être, qu’il essaiera, je n’en doute pas, de tuer dans sa cellule.
Amazone. Solitude. Copyright N° 00048010
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Commentaires
Bonjour ami de la forêt
Quel bel emmerdeur que voila,
Qui replace les choses à l envers ou à plat
Il me plait bien
Dommage qu'on l'arrêta
Mais je suis sûr qu'il s'échappera
De votre imagination
Qui brise les barreaux en éclats
Belle journée
Patricia
Bonjour René, j'ai bien aimé la façon dont tu as décrit cet emmerdeur !... Bravo...
Bon weekend. Gros bisous
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Bonjour René ..
Voila que tu nous présentes un bien compliqué personnage , mais je t'avouerai sincèrement qu'il ne me déplait pas ,au contraire , si tous les emmerdeurs étaient comme lui , le monde serait moins triste ... Pourquoi me plait il tant ? Peut-être tout simplement parce qu'il me fait rire , surtout quand il cherche a noyer le poisson , ou a casser trois pattes au canard quand c'est plus facile pour lui de le fusiller du regard .. vraiment ce personnage me plait beaucoup ...Chez nous , nous avons une autre variété d'emmerdeurs , ils nous rendent très malheureux et tu ne voudrais pas savoir ce qu'ils font , ça te ferait pleurer ..enfin tu vas peut en entendre parler au mois de novembre , il font une grande réunion qui s'appelle " Élection " ( sourire )
Bon Week-end mon ami lointain ..
Je t'envoie de bien amicales pensées a partager autour de toi ..
Nicole