• LA NATURE OFFRE SON SPECTACLE

     

    – Chaque année, en certaines régions, et à des époques bien précises, il en va de même, que les gens vont très loin pour découvrir ce que bien souvent, ils peuvent surprendre chez eux, pour peu qu’ils soient attentifs à ce qui se passe auprès de vous. Mais si j’en crois un vieux dicton, on trouve toujours l’herbe du voisin plus verte et plus grasse. Mais là n’est pas mon propos. Certes, je comprends que ce n’est pas dans les villes que l’on peut assister aux plus belles aubades, celles qui accompagnent les aurores délicates. En ces lieux qui semblent hors du monde et parfois même de la réalité, il n’est guère que le rêve qui permette aux gens de s’évader. Un instant, il est vrai, ils sont heureux. Cependant, ce bonheur est de courte durée, surtout quand il est interrompu par la sonnerie du réveil matin.

    Loin de la ruche bourdonnante des grandes cités, la vie est un véritable conte de fées. Chaque lever du jour est un enchantement. Que dis-je ; une histoire merveilleuse comme celles que l’on rencontre à chaque page des ouvrages destinés aux gens désireux de faire des voyages immobiles !

    J’ai un peu honte de vous le confier, mais chez nous, à deux pas de l’immense forêt amazonienne, il n’est pas d’aubes sans leurs cortèges d’heureuses surprises. Nulle part ailleurs, vous n’assisterez à des levers musicaux aussi variés en chants et en couleurs et en fragrances. Inutile de pénétrer au plus profond sous la haute sylve, car sous cette dernière, c’est un  concert différent qui est offert. Les animaux de nuit rentrant au gîte croisent ceux qui viennent de le quitter et parfois, les rencontres ne sont pas toujours amicales. Tandis qu’à la lisière des bois, il en va tout autrement, surtout, si par le passé, en aménageant votre coin de paradis vous avez pensé aux oiseaux ainsi que les petits gibiers, en leur destinant des points de ravitaillement ayant l’aspect d’arbres fruitiers ou des légumes dont certains rongeurs raffolent.

    Pour vous émerveiller, un seul mot d’ordre est lancé : installez-vous sur votre terrasse et savourez les bouffées de fraîcheur échappées de la nuit. Les essences hautes et fières, à regret, libèrent la brume qui s’élève en se déchirant à travers les branches et sur les épineux, comme si chacun voulait sa part de la robe de dentelles de la mariée d’un matin. Occupé que vous étiez à suivre les lambeaux du premier vêtement léger du jour naissant vers le ciel, vous n’avez pas remarqué le troglodyte familier sautillant devant vous. Soudain, pour vous sortir de la béatitude dans laquelle vous êtes plongé, et vous ramener sur terre si je puis dire, de toutes ses forces, il lance son trille triomphant, cherchant à vous faire  comprendre qu’il fut le premier vainqueur des ténèbres, et qu’il est chargé d’en avertir tous ses voisins et lointains cousins. Le long des lisières, les parakwas s’appellent et dirigent les timides retardataires vers les prochains sites où ils passeront la journée. Les colibris viennent de laisser leurs songes dans lesquels les fleurs leur offraient les plus beaux cœurs gorgés d’un succulent et riche nectar. Il baignait dans la douceur afin de les aider à se débarrasser de la léthargie dans laquelle les petits oiseaux somnolaient. Dans les houppiers, les perroquets grognons discutent bruyamment pour décider vers quel lieu de nourrissage ils vont jeter leur dévolu. Alertés, les toucans partent les premiers, ils ne veulent pas partager leurs graines de wasseyes ou de comous avec ces volatiles bavards. Les caciques culs-rouges ou jaunes traversent l’espace sans se préoccuper des priorités. Dans les nids en forme de longues chaussettes, des petites têtes réclament le premier repas. Le pin caraïbe semble heureux d’accueillir une cinquantaine de ces maisonnettes originales, prétendant que cela lui rend la vie plus joyeuse. Jouant et se poursuivant dans les premiers rayons tièdes du soleil qui vient de se hisser au-dessus de la canopée, les oiseaux tangaras, bec d’argent, bleuets et ceux des palmiers, s’accaparent déjà les bananes, les pommes cajou ainsi que les noisettes du Chili. Il y a  aussi l’élégant organiste avec son béret orange qui termine son logement douillet dans la mousse d’un tronc de parépou hérissé d’épines, alors que le martin-pêcheur effectue son vol inaugural effleurant la crique, comme pour signaler à ses résidents qu’ils doivent compter avec lui. Les poissons, effrayés, n’ont pas vu le butor mirasol qui les attend à la prochaine marre. Les loris, petits louis et les sporophiles réunis interprètent sans plus  tarder une mélodie digne de la plus belle opérette, en commençant leur récolte de graines. Les pigeons roucoulent tandis que les trogons traversent le verger sans se presser ; ils ont jeté leur dévolu sur une grosse termitière construite dans un manguier. Les vachers luisants, proches parents des coucous, observent de leurs branches les nids dans lesquels ils déposeront leurs œufs, laissant au propriétaire, le soin de nourrir leur progéniture. À tous les niveaux de l’existence, on découvre des opportunistes. Il en sera ainsi jusqu’à la tombée de la nuit, où d’autres espèces viendront mêler leurs chants et leur joie à nos rêves, dans l’immense cage naturelle ne possédant aucun barreau, que nous partageons avec les hôtes de la forêt. C’est alors que, fermant les yeux, nous nous disons que si nous ne sommes pas au paradis, nous n’en sommes pas loin.

    Amazone. Solitude. Copyright 00061340-1

     

    Photo glanée sur le net.


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