• LE MARCHEUR DE NOËL 2/5

    Dans l’esprit des contes et légendes de Noël

     

    – À mesure que notre voyageur avançait, la chaleur devenait accablante. Traversant une immense savane, soudain, il s’arrêta.

    – Me voici donc avec des hallucinations maintenant ? Sont-ce des mirages qui m’invitent à les rejoindre, à moins que ce soit des chimères qui se moquent de moi ?

    Elles flottaient dans un air saturé et lourd d’une moiteur inconfortable, mettant à rude épreuve l’organisme du marcheur. Plus il allait à leur rencontre, et plus elles se mouvaient dans l’espace, légères, interprétant des danses étranges. Il comprit qu’il ne les rattraperait jamais. Elles ne lui étaient pas destinées, se trouvant en ces lieux que pour obliger son esprit à demeurer vigilant, afin qu’il ne sombre pas dans l’inconscience. Se souvenant que sur son ancien continent les gens s’apprêtaient à fêter Noël, il eut une nouvelle pensée amusée envers ces personnages qui flottaient au-dessus de la piste. Il venait de les imaginer revêtues d’une longue pelisse rouge ourlée de fourrure blanche, et coiffée d’un bonnet au sommet duquel se balançait un pompon. Se reprenant, il se fustigea en se disant qu’il commençait à perdre pied dans cette étendue semblant ne jamais se terminer. Plus il marchait, et toujours la forêt qu’il apercevait loin devant lui reculait. Il comprit qu’elle était pour lui comme la Terre que devine la vigie d’un bateau. Dès l’instant où il la voit, elle n’est qu’une ombre qui flotte au sommet des vagues. Puis, au fil des heures, elle se hisse sur l’eau avant d’offrir un réel profil. Hélas ! Si le vent faiblit, les voiles devenues molles retardent l’arrivée vers le port. Il en est de même pour notre voyageur ; il avance péniblement, et il ne touchera l’abri désiré qu’à l’instant où le soir investira l’espace. Des arbustes chétifs annoncèrent la fin de la traversée herbeuse, d’où, de temps à autre, des bêtes étranges s’enfuyaient à l’approche du marcheur. Il prenait soin de ne pas s’écarter de la trace faite par les hommes depuis toujours, car elle était le seul endroit où il pouvait distinguer un éventuel reptile, attendant patiemment sa victime. Il n’était pas sans savoir que dans ces régions, la morsure des vipères ne pardonne pas aux imprudents. Enfin, il aborda la lisière de la forêt. Après avoir inspecté les environs, il se laissa tomber au pied d’un arbre de belle taille. Il était tellement épuisé, qu’il ne chercha pas à deviner à quelle famille cet immense végétal appartenait. Il se contenta  de remercier le ciel de l’avoir planté à cet endroit, en même temps que tous ceux qui formaient une sylve salvatrice. Combien d’heures resta-t-il là, allongé, le regard fixé sur la canopée, mais n’y voyant rien de particulier, comme si elle n’existait pas ? Il n’en sut rien. Il lui sembla que ce fut les caresses de la fraîcheur qui lui fit retrouver ses sens. Il se leva et revint sur ses pas. Non qu’il veuille découvrir des indices lui servant à se reconnaître, car lorsque l’on part à l’aventure, il est rare que nous comptions les bornes qui nous indiquent la longueur du chemin parcouru, avouant ainsi notre impatience, mais son instinct qui lui soufflait que s’il cherchait à terminer la journée sur une belle image, il ne devait pas tarder à reprendre sa marche.

    En tout point de la planète, la ronde du soleil et de la lune est toujours la même. Ce sont des astres curieux qui se suivent depuis la nuit des temps, sans jamais pouvoir se rejoindre, ni espérer se dépasser, et encore moins faire un bout de route ensemble, devisant tranquillement. La lumière baissait en intensité et la douceur remplaçait la chaleur. Il est un fait qui surprenait notre globe-trotter ; sous ces latitudes, les gens arborent une allure nonchalante, alors que les éléments naturels semblent toujours pressés. En effet, dès que le jour émet le désir de paraître, les choses se précipitent, afin que le Roi-Soleil n’ait pas à attendre derrière l’horizon. Très vite, il passe par-dessus, indiquant aux autres locataires de l’univers que le moment est venu de lui laisser l’espace. Il en va de même pour la nuit, qui ne traîne jamais en chemin. On croirait même que c’est elle qui pousse celui qu’elle déteste, car il lui fait de l’ombre. Et pourtant, elle sait ce que signifie l’obscurité, puisqu’elle en est la fille naturelle, ainsi que des ténèbres qui l’accompagnent. Voilà donc les instants précieux que notre marcheur ne voulait sous aucun prétexte manquer. Le premier pour le réveil du monde, le second, pour son endormissement. Quel cadeau extraordinaire, se disait-il, que d’avoir la chance d’assister aux deux principaux événements qui scandent, tel un cœur universel, les battements de la vie sur lesquels l’humanité règle la sienne ! (À suivre)

    Amazone. Solitude. Copyright 00061340-1

     

     


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :