• LE PREMIER JOUR

    – Ainsi, l’an nouveau vient-il de se glisser jusque dans notre lointaine forêt. Oh ! Je vous rassure, il le fit dans la plus grande discrétion. Il ne prit même pas le temps de revêtir le ciel d’un bel habit de fêtes, comme lui seul a le secret quant au choix des nuances. Qu’importe ; il est là, et rendons-lui hommage, comme nous le faisons lorsque nous accueillons un ami arrivé depuis le bout du monde, à la différence que celui-ci est souvent épuisé, tandis que l’année, elle, est encore toute fraîche.

    Soudain, il me vient à l’idée, que le jour qui se présente n’est rien d’autre qu’un nouveau livre blanc dont il nous revient la responsabilité d’en noircir chacune des pages. Quand nous écrirons sur la dernière feuille le mot fin, je ne doute pas que nous le ferons avec un sourire qui se voudra sans doute quelque peu ironique. En effet, nous ne pourrons nous empêcher de comparer nos récits avec les précédents, et nous nous apercevrons vite qu’à quelques phrases près, nos histoires se ressembleront. N’oublions pas que si l’année change, il n’en est pas de même pour chacun de nous. Nos destins vont toujours sur la même route. Certes au long de celle-ci, nous rencontrerons de nouveaux amis, récoltés des sourires engageants, mais hélas, aussi, nous aurons à soigner des cœurs meurtris, mettre du baume sur des cicatrices et aidé l’amour à demeurer dans les foyers où il avait grandi. Néanmoins, sans que nous soyons tentés de regarder par-dessus notre épaule ce que fut le passé, nous savons nos désillusions si proches de nous, que nous les entendons trépigner derrière la porte. C’est que l’an qui nous a quittés le fit dans la douleur et l’indifférence des jours qu’il a cependant fait naître dans des aubes hésitantes. Il les a élevés jusqu’au soir, dans lequel il disparaissait, ignorant que le lendemain lui appartenait.

    La vie n’est pas une longue histoire parsemée de douceurs et de rêves qui réclament à être réalisés. Elle est aussi un chemin ensemencé d’obstacles de plus en plus difficiles à escalader à mesure que nous avançons dans l’existence qui nous est attribuée. Celle dont nous avons désiré qu’elle soit plus belle ressemblera à la précédente, et forcera nos désillusions à renaître de leurs maux. Toutefois, puisque l’espérance est le moteur de notre âme, profitons de l’an tout neuf pour lui renouveler notre confiance, et promettons-lui avec sincérité que nous changerons notre façon d’être, celle de respecter nos paroles, ainsi que tous ceux, qui viendront frapper à notre demeure.

    En vérité, il n’appartient pas à l’année d’être meilleure ou non. C’est à nous de faire le premier effort pour être différents. L’individu que nous sommes n’est rien d’autre qu’une maison pour nos habitudes et nos songes. Alors, pourquoi ne pas en ouvrir les portes et fenêtres pour l’aérer d’abord, et ensuite pour jeter ce qui nous embarrasse en même temps que cela nuit aux bonnes relations avec les voisins ? Je devine que vous penserez que nous ne serons pas nombreux à tenir les promesses faites dans l’euphorie d’un instant de joies entremêlées. Le passé nous le démontre chaque fois que nous le dépoussiérons. Cependant, il est si facile de se poser une unique question dans le nouveau matin :

    – Que suis-je, et quel individu je souhaite être ?

    Mais aussi ; pourquoi fais-je ceci et au nom de quoi, et vers quelle destinée cela me conduit-il ? Ai-je besoin de tous ces mirages pour accompagner mes pas vers les lendemains ? Ne suis-je pas armé pour affronter seul l’avenir qui se dessine devant moi ? N’ai-je donc pas le courage de redevenir le personnage que j’étais jadis ; c’est-à-dire, moi-même ? Pourquoi toujours me retenir aux branches, alors qu’il me suffit de les lâcher pour gagner la terre ferme sur laquelle prospère la liberté ?

    Oui, être libre dans ses pensées, dans les jours qui soudain s’éclairent d’une lumière nouvelle. Nous ne sommes pas obligés de ressembler aux autres. C’est pour cette raison que nous sommes différents et ceci représente notre plus grande richesse. Nous ne sommes pas semblables pour que nous soyons complémentaires.

    Voilà ce que m’inspire ce premier jour d’une année qui a déjà changé d’avis, et de chemise, car du soleil de ce matin, à nouveau la pluie nous gratifie de sa présence. Elle ressemble aux larmes du ciel, comprenant soudain que sur Terre, rien ne sera bouleversé sans la volonté des hommes.

    J’adresse mes meilleurs vœux à tous les amis qui nous font la gentillesse de s’arrêter un instant sur leur chemin, pour venir à notre rencontre. Soyez le plus heureux que vous le puissiez. N’hésitez pas à demander à l’an nouveau le plus de bonheur possible pour vous et pour les vôtres.

     Amazone. Solitude. Copyright 00061340-1

     

     

     

     


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