• Quand la vie s'offre en cadeau

    — Il sera bientôt l’heure du repos annuel tant désiré de tous. Chacun aura depuis longtemps réfléchi à la destination vers laquelle il s’envolera, roulera ou plus simplement se rendra, sac bien arrimé sur le dos et bâton à la main. Certains d’entre nous voudront trouver le paradis dans lequel ils espèrent ne rencontrer personne de leur entourage qu’ils croisent chaque matin. D’autres s’isoleront pour des moments intenses et intimes de méditation profonde de laquelle, pensent-ils, ils renaîtront plus fort, plus sains. Enfin, il y aura ceux qui ne savent pas quitter les amis et qui partiront ensemble, estimant qu’en eux il y a toujours quelque chose d’extraordinaire à découvrir.

    — Mais toi, sur quel horizon tes yeux se poseront-ils, avez-vous envie de me demander ? 

    — Oh ! Moi, vous répondrai-je, je n’ai jamais su partir en vacances. J’aurai passé ma vie à inventer sans cesse de nouvelles situations qui réclamaient que je me penche toujours sur elles, comme l’enfant dernier né. Mais rassurez-vous, nous n’en avons pas pour autant oublié d’apprécier l’existence. Car pour vivre intensément, il n’est point utile de partir très loin de son nid. Prenez le temps d’observer l’oiseau ; les plus belles arabesques qu’il prend plaisir à dessiner dans le ciel, ne sont-elles pas à proximité de son repère, afin d’initier ses petits impatients d’imiter les parents ?

    En fait, mon évasion ne sera pas éloignée de ma zone de vie. Ce sera tout près, sur la côte rocheuse en cet endroit, où, depuis la nuit des temps la terre et la mer se défient sans relâche. C’est comme un jeu dans lequel il n’y a jamais ni gagnant ni perdant. Prenant leur élan, les vagues se forment au loin puis viennent se fracasser sur les rochers où elles éclatent en des gerbes géantes dans lesquelles la lumière pose des couleurs éphémères. Parfois, la mer semblant fatiguée se laisse mourir en douceur sur les galets qui la divise avec tendresse, permettant à l’écume de s’infiltrer entre chacun d’eux, comme pour leur raconter les histoires merveilleuses du grand large. En d’autres occasions, les rouleaux se succèdent à une allure folle laissant croire à la côte qu’elle contemple son dernier soleil. Puis c’est l’assaut final et la dispersion des embruns dans l’air qui s’emplit subitement de mille odeurs marines, ramenées depuis l’autre côté du monde. La puissance océane se replie honteuse d’avoir manifesté une démonstration de force bien inutile, et réclame à la terre un temps mort. C’est l’étal, l’instant où même les dieux retiennent leur souffle pour ne pas troubler la réflexion de la nature.

    Je réalise alors qu’en ces lieux magiques je possède le plus grand bonheur que l’homme n’ait jamais inventé : la vie, tout simplement avec l’eau, la terre, l’arbre et le ciel qui les contemple. À ces éléments viennent s’ajouter la liberté et l’amour quand il décide de m’y rejoindre. La main cherchant celle de ma voisine, le regard posé sur l’horizon à la découverte d’une terre lointaine, un continent qui se serait perdu et que le flux rageur viendrait rapporter à nos pieds. Au-dessus de nous, le zéphyr chasserait dans un autre coin du ciel tous les nuages, les priant d’aller dessiner ailleurs des visages ou des personnages, afin que nous puissions profiter de la profondeur mystérieuse du firmament. Le soleil alors sera libre d’admirer nos corps en les caressant pour une fois de ses rayons les plus doux. Nous fermerons les yeux et ne penserons plus à rien. L’océan pourra jouer avec ses vagues qu’il va chercher très loin, en les faisant rouler, imitant le temps qui ne s’arrête jamais. Il ressemble soudain à un souffle de géant. Inspiration, expiration ; flux et reflux. Oui, le monde respire, la vie exhale son haleine parfumée de mille fragrances et nous invite à suivre son rythme !

    Ces instants-là, ne sont-ils pas les plus merveilleux cadeaux que l’existence ne nous ait jamais faits ? Après ces moments d’intense bonheur, où voudriez-vous que nous allions pour découvrir que la plus belle chose ne se trouve qu’à quelques pas de nous et qu’il nous suffit de fermer les yeux pour laisser le bien être pénétrer jusqu’au tréfonds de nos êtres ?

    Amazone. Solitude. Copyright n° 00048010-1

     

     

     


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