• Qui va lentement...

    — Qui, au hasard de ses pérégrinations, n’est pas tombé en arrêt surprenant un événement plus ou moins burlesque, entraînant des réactions différentes selon les sensibilités des ou des autres, nos sentiments divergeant devant les évidences. C’est alors que le plus souvent un phénomène de transfert s’établit sans que nous en prenions vraiment conscience.

    Il arrive forcément le moment où nous ne pouvons nous empêcher de comparer les situations découvertes, à d’autres, rencontrées, ou vécues par nous-mêmes.

    À la vue de cet escargot en posture périlleuse, qui pourrait jurer qu’il se sortira sans aide extérieure de cette fâcheuse position ? J’imagine que beaucoup ne donneraient pas cher de l’avenir de notre gastéropode s’essayant au funambulisme. Cependant, bien que cela ait échappé à nos observations, il y a bien longtemps que nous-mêmes sommes partis en vrille et que personne n’ouvrit les yeux suffisamment tôt, afin que les plus courageux reprennent les commandes de notre appareil devenu fou.  

    Au contraire de nous, l’escargot, plus rusé, estime avoir tout le temps devant lui pour se rendre maître de la situation. La première réflexion qui lui vient à l’esprit est de ne mettre personne en cause. Il se sait le seul responsable des risques qu’il a pris. Certes, si cela ne se déroulait pas comme il l’espérait, il pourrait toujours se reprocher d’avoir eu les yeux plus grands que le ventre ! Après réflexion, il pourrait également se dire qu’au pire, il se passerait d’une gourmandise si vraiment elle est inaccessible et qu’il lui faudrait effectuer une marche arrière.  

    Par opposition au comportement à l’animal, nous aurions dénoncé la démarche douteuse de mille personnes et même tous les saints du paradis si cela ne suffisait pas. Nous, nous alerterions par de nombreuses et bruyantes revendications, nos dirigeants les priant de nous sortir de ce mauvais pas dont cependant, au préalable, ils nous auraient expliqué les dangers, afin de ne pas reconnaître que l’impasse au pied de laquelle nous sommes n’est due qu’au laxisme que nous entretenons savamment en même temps que notre éternel attentisme devant les événements dépassant notre entendement.  

    Il est quand même à déplorer que nous ayons toujours besoin d’un responsable à défaut de trouver le meilleur coupable.  

    Nous sommes bien obligés de reconnaître que nous avons de bien curieuses façons de réagir aux divers imprévus qui bordent nos chemins.

    À l’endroit de toutes choses, nous mettons en évidences les méthodes des apprentis sorciers dont cependant, nous adoptons les principes à longueur de temps. Nous nous acharnons à vouloir toujours soigner les effets plutôt que de nous préoccuper de leurs causes.

    Nous devrions plus souvent prendre exemple sur notre environnement afin de gérer au mieux notre propre existence. Humblement, nous devrions remettre sur le métier notre ouvrage, en démonter les fils et nous employer à reconstruire une nouvelle trame plus solide et surtout plus durable. Nous devrions retourner plus fréquemment à l’école de la vie pour y réviser les leçons apprises puis oubliées, car de toute évidence, les ans qui se profilent à l’horizon ne seront pas tendres avec nous. Ils souriront à quelques-uns, mais ils lamineront le plus grand nombre.

    Pendant ce temps, notre escargot reste serein sur sa balancelle. Il étudie posément son choix sans le remettre en cause, afin de trouver la réponse à son problème et qui rendra plus confortable une position jugée précaire.  

    Pour la plupart d’entre nous, pourtant réputés pour être plus rapides, devant pareille situation, nous resterions immobiles, les pieds plantés dans la gadoue, pestant, vitupérant tout en nous désolant que personne n’ait songé à installer une branche à notre portée qui nous permettrait de nous hisser au niveau supérieur.

    Mais alors, me demanderez-vous, quelle est donc cette force inconnue qui nous sépare et nous fait paraître si faible devant cet animal à la réputation si fragile ?

    D’abord, lui, il ne se préoccupe pas du temps. Depuis toujours, il en a fait son allié. Il ne se précipite jamais au-devant d’une situation périlleuse. En son esprit, que d’aucuns prétendent qu’il n’occupe pas beaucoup de place en sa personne, il y a fixé une fois pour toutes ses objectifs. Il ne se laissera jamais distraire par aucune autre condition même les plus alléchantes. Il a le privilège de se recroqueviller à l’intérieur de sa demeure si un danger venait à perdurer, alors que nous, nous avons la prétention de vouloir les réduire à néant au fur et à mesure qu’ils se présentent, sans prendre le temps de les laisser s’épuiser d’eux-mêmes.  

    Nos personnages sont faits d’un curieux assemblage de courage, d’inconscience et parfois d’irresponsabilité qui nous conduit tout droit au pied du mur devant lequel nous butons. Lui ne s’embarrasse pas de préjugés. Il a décidé que la feuille qui se balance au gré du vent telle la cape rouge du toréador dans l’arène est son objectif et que rien ne saurait le dissuader de l’atteindre.  

    Il nous arrive de nous moquer de lui en lui donnant du : « bonjour monsieur, au revoir madame ». Il n’en a cure, quant à l’amour, il peut nous en remontrer !

    S’il pouvait nous répondre, il nous dirait certainement, « rira bien qui rira le dernier » ! Il n’est jamais las de traverser les ans, alors que nous, pauvres humains toujours angoissés, nous en égrenons chaque instant.

    Grâce à ses yeux télescopiques, il voit les dangers se profiler depuis l’horizon, alors que nous, nous les découvrons à l’instant où ils frappent à notre porte. Il est têtu et ne renonce jamais, tandis que nous, de guerre lasse, il nous arrive d’abdiquer.

    Notre héros aura eu le temps de digérer l’objet de sa convoitise que nous, pauvres hommes, nous serons toujours à nous débattre avec nos questionnements enfantins, les équations, ainsi que les éternels pourquoi !

    Amazone. Solitude. Copyright N° 00061340-1

     

     


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