• Reflets de mémoire

     

    Reflets de mémoireL’envie d’exister, tout simplement

     

    — À la page des souvenirs que je pourrai traduire à mes petits enfants si un jour ils m’en font la demande, je crois que sans hésitation je leur parlerai de cette image qui berce encore mes rêves, alors qu’en ce temps-là ils n’en étaient pas.

    Chaque reproduction n’était que le reflet de la réalité de la vie, et celle-ci suffisait amplement à ma gourmandise.

    L’image que je me complus à enjoliver par la suite était celle d’un lieu qui m’aura enseigné les premières notions de la liberté et allumé au fond de mon être un feu qui depuis ne cessa jamais de brûler et qui s’appelait désir d’aventures.

    Du haut de mes jeunes années encore incertaines sur de frêles jambes, je contemplais alors la rivière et je voulais, quel qu’en soit le prix à payer, devenir aussi libre qu’elle. Je désirais aller voir plus loin et toujours plus encore et au-delà s’il existait. Lorsque je me penchais sur son onde, celui qui me ressemblait semblait me dire :

    — Prends le temps de la regarder. Elle passe pour nous être agréable, mais ne s’attarde jamais sur les berges. Elle y prélève seulement quelques souvenirs, qu’elle confiera un jour à l’océan, comme des présents que l’on offre aux divinités.

    — Cette belle époque de mon existence me fit comprendre pour la première fois que la liberté était semblable à l’oiseau, aussi fragile que lui malgré ses ailes paraissant infatigables et comme lui ne supporte pas d’être mis en cage ; fût-elle garnie de barreaux dorés.

    Plus qu’en tout autre lieu, je sais que pour moi, c’est ici que la graine de la connaissance a levé, en cette campagne qui semblait faire le tour de la terre.

    Déjà, en moi, une petite voix me disait que cette plantule ne demandait qu’à grandir et fleurir, et elle serait ravie si cela pouvait se faire sous d’autres cieux.

    C’est alors que je compris qu’il me fallait être comme le vent qui agite les feuillages, évitant soigneusement de ne se poser sur aucun d’eux.

    Sans doute qu’à ce stade de la conversation mes petits enfants me demanderaient-ils si j’étais un nomade ou est-ce que je le devins au gré de ma vie ? Il est probable que je le fus un peu ; n’ai-je jamais fui, tantôt ici, tantôt ailleurs, un jour plus loin un autre plus éloigné encore ?

    Sans tout à fait en comprendre la signification, je ne voulais pas ressembler à ces choses et ces êtres qui à cause de leur inertie paraissent morts ou souffrants, certaines étouffées par les remords.

    On pourra m’opposer toutes les définitions que l’on voudra, mais au fond de moi je compris très tôt que la vie n’était rien d’autre qu’un élément vivant et qu’à ce titre, elle ne supportait pas d’être figée.

    À quoi ressemble une marionnette si aucun personnage ne lui prête sa voix et ses gestes pour chez les enfants engendrer les rires ou la colère ?

    La vie à laquelle j’aspirais, je la voyais comme un mouvement perpétuel escaladant les monts à la recherche d’images nouvelles, de parfums enivrants et même de musiques venues de pays inconnus, dont les notes, pareils à des papillons venant se poser sur l’épaule afin de murmurer à l’oreille les douceurs d’autres cieux. La petite voix ne se lassait pas de me séduire par ses démonstrations.

    À la vie, me disait-elle, tu ne peux lui refuser sa main tendue. Elle ne désire rien d’autre que de te conduire vers le bonheur qui t’attend sur des continents que jusque-là tu ne vois que dans les rêves. Ton esprit, me disait-elle encore, doit s’enrichir à l’instar de tes poumons qui ne se suffisent pas de quelques inspirations. Les yeux ne sauraient être privés du spectacle de la nature qui donne sans jamais rien demander et ils doivent toujours être à la recherche des sourires qui fleurissent sur les visages à travers le monde.

    Chaque jour, cette chère petite voix, lorsque j’arrivais sur les berges de la rivière qui se divisait à cet endroit pour donner vie à un moulin, me répétait que la vie, en pénétrant en nous, provoque une exaltation permanente pareille à un feu d’artifice.

    — Tu es alors à la porte de la divine jouissance, murmurait-elle avec malice. Tu retrouves alors le même plaisir que celui que tu éprouves à cet instant où le poisson titille ton appât. Il ne fait pas que le gouter. Il te teste ; c’est alors que tu l’éprouves. Il t’amuse en s’offrant le luxe d’aller voir ailleurs ; c’est alors que tu le ferres.

    — Ces émotions, je les ai ressenties alors que je n’étais qu’un gamin qui s’enfuyait à travers champs et bois. Je voulais que mes jours ressemblent à des frissons qui n’en finissaient jamais de parcourir mon corps, dès lors mes pieds sentaient sous eux la douceur de la terre. Comme j’étais un enfant obéissant, j’ai écouté la petite voix qui me disait que la lumière n’était que le reflet de la vie.

    Alors, je suis parti à sa rencontre et depuis ce jour là, je ne suis plus jamais revenu vers la rivière qui me laissa embarquer sur son onde. Mais je ne l’ai jamais oubliée.

    Était-ce trop demander que de vouloir épouser le bonheur et ignorer la souffrance et les saisons qui font pleurer les cœurs ?

     

     

    Amazone. Solitude. Copyright N° 00048010  


  • Commentaires

    1
    Mercredi 10 Août 2016 à 23:45

         Bonjour René ..
    La  route  qui  mène  a  ton  univers , m'est  de  nouveau  permise ,
    Je  vais  donc  reprendre  le  chemin de ma lecture  sur  tes  pages ,
       A  bientôt  ami  lointain ..
    Nicole ..

    2
    Jeudi 11 Août 2016 à 00:04

           Je viens de lire  le récit  de  tes  souvenirs .
       Il  est  certain  qu'a  chaque  individu  que  nous  sommes  ,
                   il lui serra  permis  de  rêver .
                   encore  faut  il  qu'il  l'accepte  ..
                    Bonne  journee  ami  lointain ..
                        Amitié  des  US ..

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