• Une année s'en va

    – Cette année, qui s’apprête à en finir n’aura pas été celle que nous avions tant espérée. Bien que l’été essaya de nous faire oublier ses premiers faux pas, têtue, elle décida de maintenir son cap, refusant même de s’approvisionner en poudreuse généreuse. Drôle de préambule, me direz-vous, pour expliquer qu’à ce moment de l’année, plus personne n’attend rien de celle qui s’était cependant annoncée triomphalement. À propos de la neige et des froidures en tous genres, elle aurait prétendu qu’elle laisse le soin à celle qui lui succédera, de recouvrir d’un épais manteau blanc, les plaines et les montagnes, comme si elle refusait de cacher les nombreuses larmes et souffrances qui parcoururent ses jours.

    À cette époque où l’année s’en va, nous ne sommes pas sans nous poser une multitude de questions à son sujet. Tout d’abord ce qu’elle fut, puis ce que nous aurions souhaité qu’elle soit, mais surtout si nous ne sommes pas nous-mêmes responsables du désarroi dans lequel elle se trouve et qui la précipite vers la porte de sortie.  

    La neige, dis-je, n’aura pas eu la charge d’effacer les stigmates de toutes les blessures que nous avons pu infliger à cet an qui rapidement ne fut pas plus nouveau que ses prédécesseurs. S’il nous était possible de quantifier les cicatrices, nous nous apercevrions qu’elles furent nombreuses et quotidiennes, l’une poussant l’autre pour occuper la meilleure place. C’est qu’au moment où l’an s’en va, nous osons parfois nous retourner vers ce que nous allons laisser comme traces, en souhaitant qu’elles ne soient pas d’une tristesse à faire regretter nos actes.

    Bien souvent, à l’heure du bilan, certaines plaies en profitent pour se rouvrir afin que nous comprenions qu’elles n’ont rien oublié. Il en sera de même pour les mots blessants que nous aurions pu laisser échapper et qui sont toujours à la recherche d’une malheureuse victime. Je ne puis passer sous silence les larmes qui seront nombreuses et impossibles à éponger, en ces jours où l’esprit est encore englué dans les meurtrissures des cœurs et des corps.

    C’est un peu tout cela, une année qui s’essouffle, mais heureusement pour nous, pas uniquement tout cela. Si les souffrances furent légion, les attentes déçues, il y eut cependant de larges plages d’éclaircies. Nous le savons bien qu’un ciel ne reste pas indéfiniment bas et sombre. De temps en temps, lui aussi a besoin de se déchirer, pour se rassurer qu’au-dessus son plafond le firmament détient toujours l’immensité bleue, comme si elle était figée.

    À peine les premiers rayons d’un soleil que l’on croyait disparu apparaissent-ils, qu’immédiatement les souvenirs douloureux commencent à s’estomper. Nous les déposons devant notre porte afin que le vent les emporte et les dissémine le plus loin possible de nos maisons. Les sourires reviennent illuminer les visages et la sérénité retrouve sa place. C’est que nous ne sommes pas des enfants de la nature pour rien et d’elle, nous avons retenu certaines de ses leçons. Malgré nos lamentations, nous savons bien qu’en son sein, un désastre, n’est jamais une chose irrémédiable. Le désespoir passé, elle profite de l’accalmie pour laisser s’épanouir les premières fleurs. Mieux, elle leur donnerait l’éclat du soleil si celui-ci était encore caché par un épais brouillard.

    Pourquoi ces végétaux délicats et colorés plutôt qu’une autre variété ?

    Pour nous faire comprendre que même d’aspect fragile, elles ne manquent pas d’audace et ne craignent pas d’affronter des éléments beaucoup plus forts qu’elles. N’avez-vous jamais vu, au cours de votre existence, un faible obliger un puissant à reculer ? Les fleurs sont pareilles aux femmes qui parfois nous semblent courroucées, mais auprès desquelles nous fondons, à peine laissent-elles le sourire illuminer leurs yeux. Le courage que nous offrent ces plantes pour nous séduire nous suffit pour nous inciter à redonner vie à l’espoir qui s’affichera pour les lendemains.

    Il en est ainsi qu’il faut qu’une année honteuse s’enfuie pour que nous comprenions qu’elle est le prélude du renouveau qui s’efforcera de faire revivre nos joies et nos petits bonheurs. Pour autant, nous n’oublierons pas nos forces perdues en chemin. Ce qui fut inscrit dans la douleur ne pouvant s’effacer d’un revers de la main ; nous ferons seulement cohabiter nos sentiments pour que les meilleurs prennent le dessus des plus faibles. Préparons-nous à accueillir la nouvelle année en laissant nos cœurs offerts l’accepter comme si elle était la plus belle fleur, avec ses couleurs et la délicatesse qui l’accompagne.

     

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