• — Je vous ai déjà parlé de la situation du village de notre commune, qui vécut quasiment isolé sur les rives d’un fleuve.  Le bourg était groupé autour de son église et si chacun savait que son territoire était grand comme quatre fois, l’île de La Martinique, on faisait semblant de l’ignorer. Le temps, qui jusque-là ne passait que discrètement en déposant les odeurs mélangées des abatis et de la forêt avait fini par se lasser. Il avait chuchoté à l’oreille du précédent locataire de l’hôtel de ville qu’il devait installer des gens sur l’autre rive du fleuve.

    À quoi bon un immense territoire si personne ne l’occupe ?

    Ainsi quelques lotissements agricoles virent-ils le jour, réparti au cœur de la forêt. Cela n’avait pas été du goût de tout le monde au village, qui pensait que le centre s’en trouverait déplacé, étant donné que la majorité des habitants se résideraient sur la surface accessible par la route puis les pistes. Cependant, les avis étaient divisés, car les jeunes estimaient que leur village était un peu étroit, manquant d’ouverture sur le reste du monde. Ainsi, pendant des mois le bourg vécut-il dans la tourmente. Les anciens tenaient à leur calme, les forces nouvelles réclamaient le changement. L’état d’esprit s’était dégradé et il avait réussi à transmettre son malaise au fleuve, qui jusqu’à lors avait coulé des eaux heureuses. Il caressait les berges, prenait des informations sur une rive pour les déposer sur une autre. Du pays indien où il s’attardait en sinuant, il collectait les nouvelles qu’il partageait avec les villages voisins. De tranquille, il devint tumultueux et même bouillonnant. Les pirogues ne le reconnaissaient plus, les pagaies ayant les plus grandes difficultés à maîtriser ses flots rageurs. Tendant l’oreille, on comprit vite que les rivalités des hommes étaient pour quelque chose dans cet air qui était à certains moments devenu presque irrespirable.

    Le différend avait bien pris naissance au cœur même du village qui vivait indolent, à l’ombre des manguiers plus que centenaires. Leurs frondaisons filtraient les mots avant de les confier aux alizés qui les emportaient vers un autre monde. En fait, depuis l’abolition de l’esclavage, jamais on ne s’était véritablement opposés à quelques décisions que ce soit. C’était sans doute pour cette raison que le malaise s’était emparé des gens ne comprenant pas pourquoi il était indispensable de changer quelque chose à un ordre établi de longue date.

    Le fleuve s’était rangé du côté de la jeunesse qui avait décidé de ne plus être plus de simples figurants relégués dans l’ombre des coulisses. Cette nouvelle génération d’hommes pressés manifestait clairement leur désir d’en découdre enfin, en devenant des acteurs à part entière, car leur tour était venu de prendre part à l’écriture des longues pages d’histoire qui se préparait. Après tout, c’étaient eux qui en rédigeraient la plus grande partie à défaut d’en être la plus belle. Ils venaient de décider qu’ils seraient les futurs dirigeants, déclamant des textes nouveaux, imprimant un rythme joyeux à ce village somnolant. Ils le désiraient vivant et souriant, à l’image des oiseaux caciques, culs jaunes ou rouges qui menaient un grand tapage dans les palmiers voisins. Ils citaient souvent le beau fleuve qui s’étalait au pied de l’église.

    — Regardez-le, disaient-ils, le montrant du doigt ; y voyez-vous une onde trouble courir à sa surface, parce que trop ancienne ? Chaque jour, une eau nouvelle pousse celle de la veille vers l’océan et cependant le fleuve coule toujours ! Mieux renchérissaient-ils : il ressemble à un chemin qui marche et qui jamais ne s’ennuie.

    De murmures, les mots qui traversaient le village étaient devenus houleux. Les cases créoles qui n’avaient connu que des jours paisibles fermèrent leurs volets à l’instant où les ambitions furent déclamées.

    Ils désiraient prendre la maison du peuple comme on le fait d’une forteresse !

    Sur les eaux, les pirogues à l’attache se dandinaient, ne sachant prendre parti pour les uns ou pour les autres, comme si elles disaient : c’est à voir ; les uns ont raison, cependant, les prétendants n’ont pas tort.

    Ils avaient voulu la mairie ?

    Ils l’ont eue ! Le village avait regagné sa sérénité, les oiseaux continuaient de se moquer et le fleuve retrouva son cours paisible.

    Certains firent même remarquer que son eau était devenue beaucoup plus claire, et que le clocher de l’église n’avait plus à se pencher pour vérifier sa tenue puisque le fleuve était plus haut et parfaitement translucide.

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  • – Le jour n’était pas encore installé lorsque le malaise se fit ressentir. Dans les étables, les meuglements n’étaient pas ceux qui d’ordinaire réclament la direction des lieux de pâtures. Dans les écuries, les chevaux et les ânes tiraient sur les longes pour de leurs ruades, frapper violemment les portes de leur boxe.

    Au poulailler, au contraire c’était le calme. Tout juste entendait-on quelques gloussements ; mais ils n’appartenaient qu’à de vieilles locataires qui rêvaient probablement de couvées anciennes. Les coqs, surpris par la nuit qui tardait à se retirer, avaient oublié de lancer leurs cocoricos indiquant qu’il était temps de laisser les songes sur les perchoirs jusqu’au prochain soir.

    À contrecœur, l’aurore se décida à dessiner quelques couleurs, mais l’ambiance n’y était pas. On pensa que ce jour-là, il n’y avait pas un, mais plusieurs soleils dissimulés en quelques endroits du firmament, tant l’air était lourd et étouffant faisait suffoquer bêtes et gens sous une brume qui restait collée à la terre. En ce début de matinée, le ciel formait une armée de nuages prêts à exploser à la moindre étincelle. Ils n’attendaient qu’un commandement pour se mettre en ordre de marche.

    Cette ordonnance ne tarda pas à être donnée. D’ordinaire lent à se réveiller, l’alizé avait cédé sa place à des vents du Nord et de l’Est et il nous sembla qu’ils avaient probablement rompu leur corde, car ils ne savaient plus de quel côté souffler. Ils tournoyaient au-dessus de la forêt, obligeant les géants à courber leur tête s’ils ne voulaient pas être menacés de la perdre. Les palmiers n’étaient pas loin d’attraper le torticolis, les feuilles étant malmenées à ce point, que certaines préfèrent abandonner quelques une de leurs longues branches afin de montrer leurs soumissions aux éléments déchaînés.

    Soudain, les rafales d’une pluie violente résonnèrent sur le toit de la forêt. Quand on est à l’écoute de la nature, rien ne peut nous échapper en ce qui concerne le moindre changement. Toutes les informations circulent accrochées aux plus petits fragments arrachés, évoluant dans les airs et venant se poser sur les gens qui ont l’audace de rester sous les ciels menaçants. L’armée de nuages remarqués auparavant s’était bien mise en marche. Elle avançait en rangs serrés, pareille à des conquérants, assurés de l’impunité et de l’absence d’une quelconque résistance. Sans état d’âme, elle hachait les feuilles de la canopée que les vents se chargeaient de disséminer à travers le monde, comme s’ils voulaient séparer les membres d’une même famille en s’acharnant sur elle, dans le plus grand plaisir.

    Il ne fallut qu’un instant pour nous laisser croire que le ciel avait disparu. Les nuages roulaient en tous sens, ressemblant à un troupeau de moutons encerclés par les loups. Pourfendant les masses noires, des dizaines d’éclairs faisaient la liaison avec le sol qui semblait exploser sous les impacts de la foudre.   À cet instant, plus rien n’existait. Il n’y avait plus de Terre, plus de firmament, aucun être vivant. La nature tout entière était prise dans la tourmente, et, pensait-on, se réfugiait sous la forêt pour échapper au déluge qui s’abattait sur elle. Nous n’étions pas encore à la mi-journée, mais déjà, le matin ayant perdu la notion de l’heure installait sans plus tarder le crépuscule. Des arbres s’effondraient, en ajoutant aux bruits des gémissements de fin du monde qui remplissaient l’atmosphère.

    La pluie redoublait de violence et les feuilles avaient depuis un bon moment cessé de faire le moindre effort pour absorber ce surplus qui ne ravissait que les cours d’eau. Ils étaient même sortis de leurs lits, investissaient les berges avant d’envahir les savanes et les sous-bois, à la recherche de nouveaux endroits où cacher leurs souvenirs. C’était l’heure de la vengeance du liquide sur le solide.

    Pendant ce temps, la voûte céleste n’en finissait pas de prendre des photos de sa dernière œuvre. Les flashes du ciel n’avaient pas terminé de crépiter, que déjà, le tonnerre roulait et se heurtait à une précédente décharge d’énergie qui donnait l’impression de vouloir enflammer la planète qui n’offrait plus de résistance.

    Peu habituées à un tel traitement, les cases tremblaient et gémissaient sur leurs pilotis. Quelques heures plus tard, les éléments s’essoufflèrent et l’alizé retrouva suffisamment de force pour pousser ce qui restait des nuages gris. Le déluge disparut comme il était venu et la nature fit comme si rien ne s’était passé, sauf que les oiseaux avaient redécouvert leurs chants dans un air redevenu respirable et qu’ils avaient à leur disposition d’innombrables nouvelles flaques pour se baigner et remettre de l’ordre dans les plumages quelque peu ébouriffés.

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  • La complainte d’une fleur abandonnée

     

    – Seigneur, je voudrais que vous me disiez pourquoi il est si compliqué de se faire aimer sur cette Terre, alors que l’on murmure en tous lieux, que par ses chemins les sentiments comme les petits bonheurs y fleurissent sur leurs bas côtés. Expliquez-moi pourquoi le malheur et les désillusions s’acharnent sur les uns et non sur les autres ? Depuis l’aube de ma vie jusqu’à l’automne de celle-ci, je l’avoue humblement, je ne fus qu’une mendiante de l’amour.

    Tout a commencé par cette rafale de folie venue de chez les hommes qui se sont acharnés sur ma famille, dispersant ses enfants comme le vent le fait des graines qu’il dissimile à travers le monde. Hélas ! Pour moi, je ne fus jamais reçu par un terreau générateur de vie, celui sur lequel germent et se développent les plus belles fleurs courtisées par les abeilles besogneuses. L’humus sur lequel j’atterris était beaucoup trop acide. S’il sut me revêtir d’une parure élégante, il oublia de me gratifier des senteurs qui font tourner la tête des insectes et se pâmer l’esprit des hommes, qui tous ont pris la posture et les manières du papillon. Ils vont, butinant de fleurs en corolles, puis s’envolent plus loin, délaissant la belle qui ne sait plus produire le délicieux nectar, celui-ci étant remplacé par les larmes amères.

    En mon cœur, l’an ne durait jamais plus d’une saison. Heureusement pour moi, le destin m’avait désigné le printemps pendant lequel je connaissais les merveilles de la renaissance. De toutes mes forces, je priais pour qu’enfin je trouve l’âme sœur, et que, délicatement, entre ses doigts aussi doux que le velours, il me cueille et me transporte dans sa chaumière, à l’abri des convoitises des hôtes prédateurs. Mais personne n’entendait mes suppliques. La nature avait à peine installée ma nouvelle robe, que déjà papillonnaient les affreux insectes qui ne pensait qu’à leur plaisir, oubliant que moi aussi, j’avais besoin d’amour. D’année en année le printemps se réveillait plus tard et finissait toujours plus tôt, remplissant mon cœur d’amertume dont personne ne voulait. Désemparée, sans personne à qui confier ma peine, j’étais persuadée que c’était moi la fautive.

    De la vaste prairie, j’étais de loin la plus belle, mais sans doute ne savais-je pas déployer ma robe de la façon qu’ont les jeunes filles quand elles se parent pour leur premier bal. Je ne demandais rien d’extraordinaire à la vie ; je voulais seulement que l’on m’aime pour ce que j’étais. Je promettais de n’être point exigeante, de me plier aux bonnes manières. Je ne désirais qu’une chose : que l’on s’éprenne de moi-même et non pour mon seul nectar, qui s’appauvrissait d’une saison à l’autre. J’aurais tant souhaité trouver des bras accueillants, un cœur chaleureux, un regard rempli de douceur ! J’avais tant envie que l’on me dise les choses de la vie, que l’on me parle de la clarté du jour, plutôt que de toujours m’entraîner vers les ténèbres !

    Ai-je fait l’erreur d’avoir voulu être la plus belle, ignorant que ce faisant je ressemblais à un mirage dont tous se méfiaient ? Certes, je les voyais accourir vers moi, les uns rusant pour s’approcher au plus près, les autres se bousculant pour arracher le peu d’espoir qui s’accrochait encore aux lambeaux de mon cœur. Hélas ! Rouvrant les yeux, je finis par me demander si ce n’était pas moi qui étais victime d’hallucinations, et si ce que je voyais n’était pas précisément les chimères qui hantent les esprits pauvres et délaissés.

    Lassée de cette existence, ne sachant plus quoi penser, un jour, j’ai supplié qu’une bourrasque plus forte que les autres vienne me changer de prairie. On aurait dit qu’elle attendait ma demande, car si tôt mon vœu formulé il fût exécuté. Je ne cherchais même pas à savoir en quel lieu je me trouvais, lorsque je pris conscience que je venais de changer de continent. Je n’eus besoin que d’une nuit pour me retrouver sous les tropiques. J’étais presque heureuse, car auparavant, autour de moi, j’avais entendu que certaines de mes voisines en rêvaient. Mais il était écrit en un lieu que j’ignorais, qu’il ne suffit pas de changer de pays pour que le passé se fasse oublier. Il nous colle à la peau, il est en nous, il grandit à la même allure que nous et parfois, le croyant enfin abandonné en route, car ne l’apercevant plus, le voilà qui surgit en ricanant au premier détour de notre nouveau chemin de vie.

    Les saisons s’enchaînent alors, les déceptions aussi. L’ivresse de la jeunesse est un piètre avantage. Dans le ciel, les nuages s’accumulent en même temps que les rondes incessantes des belles promesses et des cinglants abandons. Le nectar à disparu, le cœur s’est durci et ne sait plus produire aucun parfum. C’est l’automne avant l’heure. Profitant du premier cyclone, j’usais de sa puissance pour m’envoler vers d’autres pays, ayant la faiblesse d’imaginer que plus loin, le monde serait différent. J’appris à mes dépens qu’un cœur malheureux jamais ne trouve le bonheur, et croyant courir vers lui, nous n’allons qu’à la rencontre de nous-mêmes.

    À marcher sans cesse dans ma vie, j’ai fini par la lasser, elle aussi. Maintenant, je suis fatiguée, harassée ! Je n’ai cessé de donner, sans jamais recevoir. Je vous assure, je ne désirais pas beaucoup ; je souhaitais que l’on m’aime, juste un peu. Je voulais des bras douillets, une oreille attentive, et un cœur qui sait faire chanter le mien ! Était-ce donc trop demandé ? Alors, au fond de ma solitude, je cache mes larmes. Je vais errante, sans tenir compte des jours ni des saisons, puisque celle que j’aimais ne reviendra plus. Je croyais que le temps servait à nous faire grandir, tandis que je m’aperçois que je suis restée petite et innocente. Existe-t-il vraiment, le prince dont on me parlait naguère et qui devait m’enlever et m’emporter sur son beau coursier ?

    Rêve ! J’ai vécu un songe. Avant que s’éloigne la saison, je ne désire qu’une chose : me faire aimer ; à tout le moins, ami que je vois venir au loin, que tu cherches à me comprendre. Alors, pour toi, l’inconnu, je veux me parer de ma plus belle robe ; et que, surmontant l’encolure de celle-ci, telle la corolle qui jadis sut me faire paraître éclatante, mon cœur ne t’éblouisse pas, mais qu’il t’attire au contraire. Donne-moi la main, ami ; cueille-moi, afin qu’en ton gîte, je rayonne jusqu’à la fin de la vie. Je pourrai te rendre heureux ; j’ai de la tendresse à revendre, puisque nul n’en voulut. Si tu le désires, nous pourrions être complices, car je ne demande rien, sinon que l’on m’aime.

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  • — Nous entendons souvent dire que nulle beauté ne saurait être plus éclatante que celle qui est enfouie au fond de nous.

    Si tant de personnes l’affirment, c’est sans doute la vérité, me plut-il de croire, car elle arrange tout le monde. Cela signifie que nous avons encore bien des qualités en réserve et que rien n’est jamais désespéré ! Mais ce n’est pas qu’un aspect physique. La beauté n’est pas un élément qui serait seul à se morfondre au plus profond de nous. Mille autres vertus se trouvent à ses côtés et il appartient à celui ou celle qui nous courtise de les découvrir, sans toutefois ne jamais les mettre au grand jour. Ce n’est pas par hasard que le meilleur est si bien caché. De cette façon singulière, les valeurs dissimulées près de notre cœur auquel elles désirent ressembler sont à l’abri des envieux, des rayons brûlants qui pourraient les altérer et des évènements extérieurs qui ne manqueraient pas de les éroder. 

    Il faut comprendre qu’il n’est pas que nos semblables qui sont avides de découvrir ce que nous protégeons avec tant de soins des indiscrétions. C’est que le temps n’est pas en reste quand il s’agit de s’approprier les biens des hommes dont il jalouse les secrets. Il se désole de n’avoir aucune prise sur eux ; même en s’acharnant désespérément sur leurs personnes, il n’entame que l’enveloppe sans pouvoir en venir à bout ni mettre au grand jour les désirs et ses convoitises ; pas davantage que notre esprit il use, que nous le voulions nous-mêmes.

    Ainsi, échappant aux regards moqueurs ou inquisiteurs, nos pensées sont encordées à des fils invisibles afin qu’elles ne s’égarent pas à l’instant où elles décident de partir à la recherche des autres qualités qui font de nous ce que nous sommes réellement. En somme, nous ressemblons à cette fleur qui ne cessa jamais de tourmenter les poètes dès l’aube où une main la créa ; la rose !

    Lorsque nous la prenons délicatement entre nos doigts et que nous la portons près de notre nez, son parfum nous enivre et nous séduit. Nous caressons la corolle comme si elle était la seule responsable de ce bonheur éphémère. Mais cette fragrance n’est pas le fruit des pétales. Elles sont le produit de la mémoire du végétal qui se fit jour dans le creuset où la vie prit naissance. Ce n’est que plus tard que l’odeur s’installe dans le cœur de la fleur que défend le calice à la façon qu’avaient les remparts de protéger les cités antiques.

    Chez nous, il en est de même. Les sourires qui se dessinent sur nos visages voient leurs traits esquissés depuis les profondeurs de notre cœur, et pourtant ils illuminent nos frimousses avec la même puissance que tous les rayons du soleil.

    Avant de persuader nos lèvres à prononcer les mots les plus doux, ce sont nos pensées qui les ont élaborées dans le plus grand secret et quand le désir nous tenaille de prendre la main de l’aimé (e) c’est qu’un sentiment puissant et invisible nous le commande. Il ne peut plus nous échapper que tout ce qui brille à la lumière a pris naissance dans le cœur même des ténèbres. C’est ainsi que nous apprécions à juste titre l’éclat du soleil jouant dans les brumes matinales, alors que pour lui donner une plus grande valeur, le jour s’attarde encore dans les ramures des arbres.

    Sachant notre beauté enfouie au plus profond de nos êtres, la vie nous offre la sienne afin que nous la caressions de nos regards. Quel délice à l’instant où elle devient mélodie, nous murmurant que nous ne pouvions garder pour nous ce que nos amis désirent, parce que si les yeux sont agréables à regarder, il ne fait aucun doute, que le plaisir est immense quand on y découvre les secrets que nous tenions cachés !  Ce qui est beau et bon en nous n’est pas destiné à notre propre satisfaction, mais pour être offert à tous ceux qui en font la demande. Que serait la perle de rosée sans l’éclat du rayon lumineux qui la transperce et qu’elle garde prisonnier pour nous faire croire que ce n’est qu’à notre intention qu’elle a revêtu sa plus délicate robe de velours, incrustée de mille diamants aux couleurs de l’arc-en-ciel ?

    Alors qu’elle brille, suspendue au rameau, l’alizé, prudemment, la contourne afin que sa beauté reste imprimée plus longtemps dans la douceur du jour ; jusqu’à l’instant où une main fine et délicate vienne la recueillir pour la déposer sur le cœur de celle que l’on aime.

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