• — L’image, je vous le concède, n’a rien de bien engageant, cependant elle inspire plusieurs histoires. L’une pourrait trouver son origine dans un beau roman d’amour. Impatient, il était venu au rendez-vous qu’elle avait fixé et l’avait attendu pendant des jours. Jamais il ne s’imagina qu’elle l’avait éconduit.

    Au pied de l’arbre, il avait fini par s’endormir en rêvant à la belle, et les derniers instants de vie, il les avait imaginés s’envolant vers le paradis, étroitement enlacés sur une monture comme il n’en existe que dans les légendes.

    Se retrouvant seul au milieu d’une savane qui prenait des airs de désert lunaire, l’arbre se dit qu’il ferait mieux de suivre le malheureux, car dans un autre univers, il aurait probablement besoin d’un peu d’ombre et d’un compagnon à qui confier sa peine. Mais la réalité qui nous dévoile le dernier acte d’une pièce qui se joue chaque jour de par le monde est bien différente et plus douloureuse encore. Il ne s’agit pas d’un rendez-vous manqué, semble nous dire les restes d’un pauvre éléphant qui aimait tant sa forêt qu’il donna sa vie pour elle.

    L’histoire avait commencé quelques années au paravent.

    Un matin, le troupeau s’était réveillé alors qu’au loin, montait un bruit qui laissait à penser que l’orage était en préparation, même si au-dessus de leurs têtes, le ciel ne s’encombrait pas encore de lourds nuages noirs. Prudent, le meneur avait pressé ses congénères à reculer sous le couvert de la forêt, non loin d’une pâture restée verte malgré la sécheresse qui grandissait de jour en jour. Ils n’en étaient pas à leur premier orage et même s’il venait à jeter à terre quelques arbres n’ayant plus la hargne pour lutter contre les éléments, ce ne serait pas la fin du monde.

    Ils avançaient paisiblement, mais curieusement, la rumeur semblait les suivre. C’est alors qu’un léopard essoufflé vint à passer à proximité de la horde. Le chef l’interpella :

    — Où cours-tu ainsi que tu ne prêtes aucune attention à nos petits ? La faim viendrait-elle à manquer à ton ventre ? L’interpellé s’arrêta et expliqua au vieux chef ce qui se passait à quelques distances plus au sud :

    — Comment n’es-tu pas au courant de ce qui arrive ? Tes pieds seraient-ils devenus trop vieux qu’ils ne ressentent plus les tremblements des machines qui avancent et qui réduisent nos territoires en désert ? Ils abattent la forêt, domestiquent le fleuve, afin qu’ils puisent en lui l’eau indispensable au développement de leurs nouvelles cultures. Je ne saurais trop te conseiller de fuir pendant qu’il en est encore temps !

    — Le vieil éléphant n’avait plus la fougue de sa jeunesse. Il se dit qu’il était inutile d’engager la bataille au risque de perdre la totalité de la bande. Il recommanda donc à ses semblables de partir vers d’autres territoires. Il les rejoindrait plus tard, après qu’il eut repoussé les assauts des hommes et de leurs outils. Défendre son territoire, il savait ce que cela signifiait. Pour conquérir le sien, il avait dû livrer de gigantesques combats et il n’était pas prêt à le céder à des inconnus sans livrer une dernière bataille. Il ressentait maintenant le sol qui n’en finissait pas de trembler, comme si lui aussi voulait prendre la fuite.

    Sa décision était prise. Il rentrait en dissidence et affronterait ces hommes qui n’avaient aucun respect pour la nature qui les avait pourtant nourris abondamment sans jamais leur demander quelque chose en échange.

    Le vieux chef se dit qu’un jour ils devraient s’arrêter, car ils ne pouvaient réduire à néant toute la planète ! Ils seront bien obligés de conserver un minimum de chaque élément qui la compose pour protéger l’équilibre en place depuis toujours ! A-t-on déjà vu une personne incendier la maison qui abrite sa famille ?

    Au fond de lui, il savait bien qu’il n’était qu’un vieil utopiste. Ce qu’il avait retenu des hommes qu’il avait déjà rencontrés au cours de son existence lui avait toujours laissé des pensées indéfinissables en sa mémoire. Il avait compris depuis longtemps qu’ils n’avaient pas les mêmes raisons de vivre que les autres résidents de la forêt. À eux, il fallait tout, comme un enfant dans un magasin de jouets qui n’en désire pas un, mais l’établissement complet.

    Au fur et à mesure que le front des hommes et de leurs machines avançait, les ambitions du vieil entêté devenaient plus humbles. Il était maintenant seul devant un ennemi qu’il n’avait jamais combattu et qui n’avait aucun scrupule ni état d’âme.

    Les voyant coucher la forêt devant lui, il avait compris qu’au soir de ce dernier jour, ce qu’il avait toujours connu n’existerait plus. Il s’adossa à un arbre et lui confia qu’avant qu’ils l’abattent, ils devront lui passer sur le corps. Il réussit à repousser le premier assaut, mais ne sut jamais ce qu’il advint du reste du jour.

    Sa dernière pensée fut pour la nature assassinée et la lâcheté des autres hommes à laisser-faire, se contentant des profits que cela générait.

    L’entêtement du vieux chef l’aura certainement vaincu plus que les hommes eux-mêmes ; mais si de par le monde chacun se pose quelques questions et insiste pour faire vivre les réponses, sans doute arriverons-nous à sauver ce qui reste de notre planète.

     

    Amazone.Solitude


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  •  

     

    — Longtemps, on nous laissa penser que la misère était synonyme de pays lointains. Il était si facile de fermer les yeux sur celle qui frappait chaque matin à notre porte.

    Les temps ont changé et voilà qu’elle s’installe en prenant ses aises dans les pays qui ont encore l’outrecuidance de se proclamer riches ! En fait, les images que l’on s’évertuait à nous montrer n’étaient qu’un montage issu de celle qui hantait nos propres rues.

    Soyons sérieux. La misère, compagne de tant de gens humbles à ce point qu’ils ne se plaignent jamais, avait-elle réellement disparu de nos cités ou est-ce nous qui ne fréquentions plus certaines rues pour ne pas la rencontrer ?

    Les sociétés ont évolué et leurs centres d’intérêts se sont déplacés nous forçant à changer nos habitudes. Soudain, au détour d’une avenue, la pauvreté était là, devant nous, dans toutes ses réalités.

    Alors, ce que d’aucuns redoutaient ne tardera plus à se produire. Ne doutons pas qu’un jour la misère se lèvera et marchera dans nos rues. Comment pourrait-il en être autrement pour ces milliers de gens qui n’en peuvent plus d’être ignorés, pour qui l’avenir préfère changer de chemin plutôt que de les affronter et pour lesquels l’espoir s’est évanoui depuis longtemps ?

    Leurs jours se traînent et leurs nuits sont souvent peuplées de cauchemars. À l’heure où dans certains foyers le bonheur se joint aux convives réunis autour d’une table chaleureuse, dans le labyrinthe des villes, au carrefour des rigueurs conjuguées des saisons et des hommes, les larmes osent poindre dans les yeux qui se fixent sur l’incompréhension.

    Il est vrai que la misère n’est pas identique qu’elle soit du Nord ou du Sud, même si les effets sont semblables.

    Souvent, c’est le profit, cette espèce d’appétit insatiable des multinationales qui installe leurs usines fabriquant la pauvreté aux quatre coins de notre monde et qui rejette ceux qui ont veillé sur les premières heures de l’outil de travail, comme s’il avait été leur propre enfant.

    Les privilèges des uns ont chassé des campagnes les plus modestes pour les refouler vers les villes dévoreuses d’hommes, les projetant dans le néant.

    Ils n’étaient pas préparés à affronter l’hostilité des grandes métropoles où ils sont devenus les proies faciles des bonimenteurs sans scrupule, vendant au même prix le sommeil, le manger et mettant hors de portée les maigres parts d’un bonheur fabriqué de toutes pièces.

    Certains de ces malheureux osent nous dire en toute innocence qu’ils reconnaissent avoir joui de la douceur des jours, d’avoir côtoyé le bonheur alors qu’ils étaient deux sous un ciel qui fermait les yeux sur un amour coupable. Mais est-ce une raison suffisante pour, du paradis tomber directement en enfer ?

    Lorsque l’on vient d’une région où les jours se donnent aux hommes comme une offrande, comment se sortir de l’abîme dans laquelle ils sont jetés ensuite ?

    Comment s’enfuir de l’arène où on les oppose à l’hypocrisie, ce temple de l’égoïsme et de la méchanceté ?

    Pour survivre, ils n’ont d’autres solutions que de faire dans leur existence, de la place à la cruauté et au mépris, qui deviennent leurs compagnes d’infortune.

    Ô frères de misère ! Pourquoi n’associez-vous pas vos lassitudes pour envahir les palais aux tentures dorées où se vautrent ceux qui se repaissent de vos malheurs ?

    Réunissez-vous pour qu’ensemble vous abattiez les privilèges comme vous le fîtes en un temps de vos immenses forêts pour le bonheur des marchands et où vous ne pouviez même pas planter de quoi nourrir vos espérances.

    Mes frères, souvenez-vous que nous sommes des hommes, rien que des hommes et qu’à ce titre nous avons droit au respect et à la dignité.

    Miséreux de par le monde, savez-vous que nous représentons le plus grand nombre ?

    Avez-vous imaginé que nous pourrions être le grain de sable qui enrayera leurs machines ? Si la misère se rebelle, tout ce qui a été construit sur son dos s’écroulera.

    Allons ! Compagnons de misère, du cran ; levons-nous et marchons ! Le temps est venu pour nous d’exister et de demander au reste du monde la part qui nous revient. Je sais qu’elle n’est pas grosse, mais qui prétend que le bonheur est encombrant ?

     

     

    Merci de ne voir en ces lignes aucune allusion à quelque événement que ce soit. Le condensé de ce billet fut écrit et publié sur Orange en 2007, sous ma signature d’alors : Joreg.

    Amazone. Solitude

     

     


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    — Où que nous soyons par le vaste monde, la rumeur des combats envahit souvent l’espace, à l’heure où les esprits sont à la recherche d’un peu de bien-être.

    Le bruit des canons, l’odeur de la poudre et les cris des suppliciés n’en finissent jamais de déposer un voile sombre devant nos fenêtres.

    Quel est donc ce phénomène qui pousse les gens à vouloir toujours tout, y compris ce qu’ils ne possèderont jamais, je veux dire le temps ?

    Croyez bien que ce soir je n’aurai pas voulu vous parler de cette méthode absurde que l’on nomme la guerre avec son cortège de choses assassines qui laissent derrière elles des sentiments d’immenses gâchis. Elles mutilent des innocents et anéantissent des peuples entiers.

    Ce peut-il, que nous cautionnions de tels comportements qui divisent les ethnies et les familles, apportant dans le cœur des gens la haine qui dès l’instant où elle investie les esprits, plus jamais ne les quitte ?

    Comment peut-on évoquer ces temps meurtriers comme des matins ordinaires alors qu’avant que le soir ne soit descendu de nombreux enfants seront orphelins ?

    Ceux qui se taisent sont coupables, car ils reconnaissent le bien-fondé du chaos qui entraîne certains pays dans des gouffres d’où ils ne verront plus jamais un coin de ciel bleu.

    Il est une invraisemblance récurrente chez les hommes.

    Avez-vous remarqué que ce sont rarement les militaires qui déclenchent les débuts des hostilités ?

    Bien au chaud à l’intérieur des palais, presque toujours ce sont les gouvernements civils qui lancent les armées sur la route des intérêts.

    Mais l’étonnement ne s’arrête pas aux portes des châteaux. Étrangement, ce sont souvent d’autres civils qui inventent les armes les plus meurtrières. Pour se disculper, ils prétendent qu’elles n’étaient pas destinées à la guerre, seulement pour améliorer le quotidien des peuples.

    Ces armes sont toujours plus développées, plus précises, disent-ils avec fierté, comme s’ils s’attendaient à recevoir des compliments. Ils voudraient nous faire croire que les guerres deviendront « propres ».

    Quand est-il de l’avis des victimes ?

    Les têtes pensantes font bien les choses. Il y a d’une part les instigateurs ; d’autre part les pourvoyeurs et enfin les acteurs, et souvent, on s’assure que les uns ne rencontrent pas les autres.

    Oh ! Je sais bien que les soldats ne sont pas des innocents. Ils ont leur part de responsabilité eux aussi. Guerrier est un métier et il y en a toujours eu, me direz-vous.

    Sauf qu’en leur sein, parfois grandissent des barbares et des bourreaux. Certains en rajoutent toujours, prétextant que lorsque l’on détruit un nid de rats on élimine aussi les petits !

    Bien sûr, on me dira que dans la nature l’esprit guerrier n’est pas absent. Chaque espèce à ses soldats et la conquête de nouveaux territoires ne se font pas dans la tendresse.

    Mais est-ce là une raison suffisante pour prendre exemple sur les animaux ?

    Aurons-nous un jour le privilège de voir s’éteindre tous les foyers dans lesquels couvent des guerres ? Connaîtrons-nous ce plaisir intense qui laisse des éclats de paix dans les cœurs qui pourront battre la chamade ?

    Se peut-il qu’un jour nous n’ayons plus les entrailles qui se nouent à cause des craintes de lever les yeux vers le ciel à la recherche du missile aveugle et meurtrier ?

    Est-il possible d’espérer que bientôt il n’y aura plus d’exodes qui conduiront les gens hors de leurs villages, mais qui trouveront quand même la mort en chemin ?

    Il y a tant de questions qui restent sans réponses, car nous connaissons trop les hommes pour leur faire confiance.

    Cependant, je me plais à penser qu’un jour nous connaîtrons l’apaisement, celui qui nous fera aller au champ l’esprit léger, sans craindre de marcher sur une mine alors que c’est le grain de l’espérance que nous sèmerons.

    Je sais le crédit de mon existence déjà bien entamé, mais s’il y a un gérant de la vie, j’aimerai qu’il m’en accorde encore un peu pour voir le commerce des armes s’épuiser. Il serait remplacé par celui des fleurs que nous offririons à celles et ceux que l’on aime. Nous prendrons alors le temps de regarder dans le soir se coucher le soleil sur une journée calme, en nous disant qu’elle ne sera pas la dernière.

     

    Amazone. Solitude


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  • — J’ai toujours eu un petit faible pour les sillons que le coutre découpait avant que le versoir de la charrue le couche sur le précédent. Certes, cet aspect ridé faisait apparaître la terre plus vieille qu’elle ne l’était en vérité, mais dans ces rides, on y découvrait la beauté du monde et la douceur de la vie.

    Dans mon esprit d’enfant que j’étais alors, ils étaient comme les pages d’un livre. Ligne après ligne, une belle histoire s’écrivait, d’où naissait de merveilleuses images.

    Quand on se trouvait au milieu du sillon et que l’envie nous venait de nous retourner, nul n’aurait pu dire où se trouvait le début ni de quel côté était la fin.

    De part et d’autre de l’attelage, c’était comme un sillage laissé par un pesant roulier sur les mers. Il n’y avait ni passé ni avenir ; qu’un homme heureux au milieu de son champ.

    D’un côté, on remontait le temps tandis que de l’autre on dévalait les jours.

    De la nostalgie ?

    Pas forcément, seulement le rappel d’une époque qui fut vécue avec une telle intensité qu’aujourd’hui rien ne saurait y faire de l’ombre.

    C’était le temps où la campagne semblait plus éloignée des villes qu’aujourd’hui. On pouvait n’y aller qu’une ou deux fois l’an, s’il n’y avait pas de bestiaux à vendre. Par contre, la foire de la Saint-Michel était incontournable. C’était tout le canton qui s’y retrouvait et pour une journée, la campagne était oubliée.

    J’entends les voix qui hurlent à la mélancolie. Mais lorsque comme moi on a eu la chance insolente d’avoir connu cette époque qui sut rendre les gens heureux, comment ne pas revendiquer le droit à quelques heures de nostalgie de temps à autre ?

    Attention, ne vous méprenez pas. Je ne prétends pas que ce fut toujours la vie facile et qu’il suffisait de tendre la main pour recevoir. C’était même le contraire.

    Ce qui rendait l’existence agréable, c’était le rapport qu’il y avait avec les gens et les choses qui était différent. En ce temps là, rien ne se passait qui n’eut pas ressemblé à un conte. Rares étaient les jours où le sourire n’éclairait pas les visages sculptés par le temps.

    Ces figures possédaient presque autant de rides que de jours vécus et que de sillons ouverts par eux dans les champs ! Il était facile d’imaginer que tous ces hommes étaient nés à la suite du versoir et qu’il leur faudrait diriger l’attelage jusqu’au dernier jour.

    Sans se poser de question, ils devinaient qu’il leur faudrait passer la vie dans le sillon, tantôt en haut, tantôt dans le creux.

    Après le temps du labour viendrait celui des semailles et du hersage pour recouvrir les précieux grains porteurs de promesses et d’espérance.

    Il était inutile de demander à ces hommes rustres combien de fois ils l’auront fouillée cette terre sur laquelle ils virent le jour.

    Ils pourraient seulement vous dire le plaisir qu’ils ont eu à la soupeser, la filtrer entre leurs doigts comme pour lui insuffler l’amour qui sait faire les belles récoltes.

    Les sentiments ?

    Bien sûr qu’ils en avaient ! Ils étaient comme les bourgeons gonflant avec le renouveau et se pressant sur les rameaux. Ils attendaient l’instant propice pour éclore et s’exprimer.

    Certes, parfois ils pouvaient apparaître un peu gauches quand ils flattaient la croupe de l’animal avec la même tendresse qu’ils soupesaient l’épi prometteur ou qu’ils passaient la main sur la croûte du pain tout juste sorti du four.

    Ils étaient tellement heureux dans ces moments qu’ils en oubliaient de frôler la main de celle qui, dans l’ombre, les accompagnait. Personne ne songeait à en prendre ombrage. On savait que ce n’était pas par ingratitude, seulement parce qu’en ce temps-là, on ne prenait pas le temps de s’appesantir sur soi même.

    C’était une époque où le hasard avait pour compagnons les caprices du temps. Mais on ne songeait pas alors à faire des reproches à la nature.

    Je ne pleure pas ces jours bénis. Je les ai vécus les uns à la suite des autres en remplissant ma mémoire comme l’eau le fait du puits, d’images et d’émotions inoubliables. Quand le passé s’invite en mes pensées, je ne puis m’empêcher de méditer sur le sort de notre jeunesse à qui on ne dit pas toujours la vérité.

    Il est donc naturel qu’elle se sente humiliée, abandonnée et trompée, au milieu du sillon dont on ne sait pas s’il va vers demain ou s’il nous reconduit vers le passé.

    Pour être certain de la destination, il faut laisser à chacun le temps d’ouvrir son propre sillon pour qu’il y sème le bonheur et la richesse, et donner du temps à la récolte afin de pouvoir la transmettre à ceux qui s’en nourriront.

     

    Amazone. Solitude


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    — Nombreux sont les gens qui se posent la question à laquelle il parait si difficile d’apporter une réponse. C’est compréhensible tant l’importance de la réplique mérite que l’on y réfléchisse intensément, car au fur et à mesure que défilent les images dans nos pensées, on a le sentiment que nous n’arriverons jamais à trouver la réponse qui apporterait la paix en notre esprit. Pensez donc ! Le dernier jour ! Nous avons déjà tant de mal à boucler une valise lorsque nous nous absentons pour quelques jours seulement. Le choix des vêtements en fonctions du lieu vers lequel l’on se dirige, celui des objets qui vont avoir le privilège de nous accompagner et les photos que nous aimerions qu’elles ne nous quittent pas. Alors, imaginer vivre le dernier jour !

    Une chose est certaine. Si nous pouvons l’imaginer, c’est que déjà nous en avons été informés, donc on suppose que nous aurons eu le temps de nous y préparer. Dans ce cas, les décisions seront encore plus compliquées, car c’est toute une vie qui sera passée en revue, afin que nous n’oubliions aucun des moments les plus précieux.

    Les affaires vont se compliquer à l’instant où nous comprendrons qu’il n’est plus temps de nous apitoyer sur tel ou tel autre évènement, car à la grande horloge du temps, les secondes s’écoulent, imperturbables et sans état d’âme.

    Dans la précipitation, nous allons oublier l’essentiel des images qui auront orné notre vie et donné une saveur particulière à nos jours. Nous précipitant, nous allons nous prendre les pieds dans l’inévitable suite d’émotions qui se seront faites discrètes, mais qui pourtant ont donné du relief à notre personnalité qui paraissait désespérément plate, sans aucune perspective.

    C’est alors que regardant par la fenêtre, nous verrons le jour s’éteindre lentement. Nous nous précipiterons vers le premier interrupteur, pour que le reste de notre dernier jour ne se disperse pas dans les ténèbres.  

    Mais à bien y réfléchir, pour apprécier ou pas le dernier, mais tous les précédents, ne nous faudrait-il pas les vivre comme s’ils étaient réellement les derniers ?

    D’ailleurs, le jour présent qui se meurt dans l’intimité du soir, n’est-il pas déjà le dernier ?

    Toute notre existence, nous vivons un dernier jour.

    Pour ma part, je ne vous cacherai pas que le jour en lui-même n’est pas si important qu’il y parait. C’est sa kyrielle d’évènements qui vont se succéder dans sa lumière qui va faire de lui qu’il soit inoubliable ou détestable.  

    En ce qui me concerne, afin de terminer mon parcours sur une note de gaieté je crois que je partirai à la recherche de la dernière fleur afin que mon regard transmette à mon esprit l’image de la grâce qui illuminera le ciel qui m’accueillera. Ainsi, cela sera aussi un juste remerciement à celles qui n’auront eu de cesse d’embellir mes jours tristes et aussi d’avoir répandu tant de précieux parfums à la saveur des nectars les plus nobles.

    Je sais aussi que dans l’aube du dernier matin je chercherai le regard de celle qui aura partagé ma vie, afin d’y voler une fois encore des éclats de bonheur et le merveilleux arc-en-ciel qui fera comme une passerelle entre le ciel et la terre. Je prendrai délicatement sa main, car c’est par là que l’amour passa le premier jour pour ensuite pareille à une source, ne jamais se tarir.

    Au long de mon chemin, il réalisa des prouesses pour le tapisser d’un bonheur discret, mais ô combien chaleureux !

    Je prendrai le temps d’écouter ma mémoire à la page remplie par les sourires de mes chérubins et leur innocent amour quand ils serraient maladroitement mon cou, pour murmurer des mots gentils à mon oreille.

    Il me reviendra alors le souvenir de baisers déposés avec tendresse et j’entendrais une dernière fois chanter et danser les mots d’amour sans doute un peu naïf, mais tellement sincère.

    Le jour se raccourcissant, je m’empresserai de relire les mots d’amitié que vous m’avez écrits, souvent avec passion. Je prendrai un dernier plaisir à deviner les accents secrets cachés derrière une virgule, qui ressemblaient à des murmures d’émotions mêlées aux fragrances de l’amour.

    Oui, n’en doutez plus. L’amour est pareil à la fleur, il est parfumé et je ne me suis jamais lassé de le respirer et de me laisser enivrer à ces effluves.

    Il y aurait aussi toutes les notes d’espoir que je confierai aux alizés pour qu’ils les déposent sur le rebord des cœurs malheureux et souffrants de ceux qui n’espèrent plus.

    Sans doute n’aurai-je pas le temps d’expliquer à mes amis (es) que mes nombreuses absences n’étaient pas le fait de l’ingratitude, seulement des plages de solitude dans une vie tourmentée.

    Si cette journée devait être la dernière, j’aimerais que celle que j’aurais aimée plus que de raison me confie encore de nombreux baisers et que le temps soit suffisamment long pour qu’elle me parle encore d’amour, afin que le dernier voyage me paraisse moins long, dans un ciel qui me laissera entrevoir ses promesses, ses bontés et ses sourires.

    Amazone. Solitude

     

      

     


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